INSTITUT DESSALINIEN
Tribune pour la conscience nationale
La jeunesse est le flambeau ou l’étouffoir d’une nation La jeunesse, ce mot vibrant d’espoir, souvent porté comme un slogan, rarement vécu comme une mission. En Haïti, elle est présente partout : dans les rues, les quartiers, les écoles, les églises, les mouvements de résistance et, parfois, dans les prisons. Mais posez-vous cette question simple et terrible à la fois : est-elle flambeau ou étouffoir de la nation ?
Ce n’est pas un hasard si Dessalines, dans son combat fondateur, n’a jamais dissocié la liberté du peuple de l’éducation de sa jeunesse. Pour lui, la postérité méritait d’être instruite, fière, enracinée dans la vérité de notre indépendance et de notre dignité. Il savait que le feu de la souveraineté peut se transmettre, mais aussi s’éteindre dans l’ignorance, la manipulation et la trahison des élites.
Quand la jeunesse est flambeau
Une jeunesse est flambeau lorsqu’elle éclaire l’avenir sans brûler les ponts avec son passé. Elle est flambeau quand elle s’instruit pour servir, et non pour fuir. Quand elle s’engage pour construire, et non pour consommer la ruine. Quand elle choisit de résister à l’humiliation plutôt que de s’y accommoder.
Haïti a connu cette jeunesse-là. Celle de Vertières, celle des Cacos, celle de Charlemagne Péralte, de Benoît Batraville, celle des étudiants des années 60, celle du 7 février 1986. À chaque moment charnière de notre histoire, des jeunes se sont levés non pour mendier des postes, mais pour imposer un rêve, un sens, une rupture.
Être un flambeau, ce n’est pas briller pour soi. C’est éclairer pour les autres, c’est avancer malgré le vent, c’est être porteur d’une conscience. Il n’y a pas de nation forte sans une jeunesse éveillée, organisée, disciplinée et libre. La liberté n’est pas un âge : c’est une exigence. Et cette exigence commence à l’école, dans les familles, dans les quartiers. Elle prend racine dans la vérité historique et se développe dans la dignité quotidienne.
Quand la jeunesse devient étouffoir
Mais il faut avoir le courage de dire l’autre vérité : une jeunesse peut aussi devenir l’étouffoir d’une nation. Quand elle est abandonnée, elle s’abandonne. Quand elle est méprisée, elle se méprise. Quand elle n’a plus de rêve collectif, elle se vend au plus offrant, elle s’arme, elle consomme, elle fuit. Une jeunesse sans boussole devient une main armée contre son propre pays.
L’étouffoir n’est pas seulement une image : c’est un phénomène. Des jeunes qu’on transforme en soldats des gangs. Des jeunes livrés à l’errance numérique, prisonniers d’écrans et de fantasmes étrangers. Des jeunes qui n’ont pas accès à la terre, à la formation, au travail. Des jeunes dont le seul avenir est le départ, ou le désespoir.
Et ce drame n’est pas seulement leur responsabilité. C’est celle de toute une société, surtout de ceux qui dirigent.
Message aux dirigeants haïtiens : éduquer ou être débordés
À vous, dirigeants, chefs d’institutions, élus, autorités morales : ne vous trompez pas de combat. La jeunesse ne s’encadre pas avec des discours, mais avec des politiques courageuses. Tant qu’on continuera à investir plus dans les blindés que dans les écoles, plus dans les prisons que dans les bibliothèques, plus dans les privilèges que dans la formation, vous produirez vous-mêmes vos fossoyeurs.
Ce n’est pas un choix idéologique, c’est une réalité. Une jeunesse trahie ne devient pas silencieuse : elle devient explosive. Elle étouffe la nation quand la nation l’étouffe. Elle devient ennemie quand elle est traitée comme un poids. Elle devient étrangère quand on ne lui donne aucune appartenance.
Message à la jeunesse haïtienne : vous êtes la lignée de Dessalines
Jeunes d’Haïti, jeunes d’en bas, de l’intérieur, de la diaspora, de tous les milieux : vous êtes à un carrefour. Le monde vous attire, le pays vous repousse. Mais fuir ne sauvera rien. Car l’exil, qu’il soit géographique ou moral, ne donne pas de patrie.
Ne vous laissez pas utiliser. Ne vous laissez pas distraire. Le combat n’est pas d’être visible sur TikTok, mais d’être utile dans l’histoire. Le combat n’est pas de vivre comme les autres, mais de devenir vous-mêmes.
Vous êtes l’héritage vivant d’une révolution que le monde n’a pas encore finie d’étudier. Faites de votre savoir une arme. De votre colère, une force. De vos racines, une route.
La jeunesse n’est ni une décoration ni une excuse. Elle est une force. Et cette force doit devenir une lumière, pas une étincelle de destruction.
Choisir la flamme ou le brouillard
Le destin d’un peuple se joue dans ce qu’il transmet à ses jeunes. Leur donner du feu ou de la fumée. Leur offrir des clés ou des chaînes. La jeunesse peut allumer la torche ou allumer le feu. Ce sont les choix collectifs qui décident.
L’Institit Dessalinien appelle donc à une refondation nationale autour de la jeunesse. Non comme un slogan, mais comme priorité centrale de la République. Que la jeunesse devienne un flambeau : celui de la dignité, de la justice, de la souveraineté.
« Une nation qui trahit sa jeunesse se condamne à l’obscurité. Mais une jeunesse qui se lève pour la justice devient la lumière d’un peuple libre. »
Théodule Paul Président de l’institut Dessalinien